Interopérabilité et souveraineté des données
Vers des plateformes de données interopérables en Europe
A l’heure où l’Internet des Objets se développe fortement, de même que l’Intelligence Artificielle, et que se multiplient les plateformes de gestion des données territoriales, un défi fondamental se dresse devant les acteurs publics afin de garantir souveraineté, évolutivité et soutenabilité financière et énergétique de cette transformation numérique profonde. En effet, ces déploiements se font sans harmonisation des périmètres fonctionnels, sans définition de modèles communs de données, d’API génériques, ou encore de protocoles d’échanges de données concertés. Cela va engendrer une complexité technique, organisationnelle et réglementaire a postériori, pour faire converger et réutiliser les données produites, que ce soit sous la forme de partages entre pairs ou pour la création de nouveaux services. Relier ces plateformes à l’avenir sera extrêmement complexe. Or, cela sera nécessaire pour faire face aux défis sociétaux (atténuation et adaptation du changement climatique, vieillissement de la population, …). C’est pour éviter cette complexité et une perte d’argent public conséquente que plusieurs démarches se structurent au niveau européen pour favoriser l'interopérabilité des infrastructures de données.
L’interopérabilité désigne la capacité de différents systèmes, applications ou organisations à échanger et utiliser de manière fluide et compréhensible des données ou des services, sans nécessiter d’effort particulier de traduction ou d’adaptation. Elle repose souvent sur des standards ou des protocoles communs et permet, par exemple, à plusieurs plateformes numériques de collaborer efficacement, tout en garantissant la continuité, la qualité et la cohérence des informations échangées.
Trois instruments structurants européens y contribuent en particulier : l’European Interoperability Framework (EIF), les mécanismes minimums d'interopérabilité (MIMs), et le tout récent Interoperable Europe Act (IEA). Complémentaires, ils offrent aux administrations publiques – y compris aux collectivités territoriales – une boussole et des outils pour concevoir des services numériques plus interconnectés. de leur plateforme.
En savoir plus sur l'EIF, l'IEA et les MIMs
Pourquoi et comment le Cerema s'empare du sujet ?
Le Cerema, en tant qu’acteur public de référence sur l'adaptation au changement climatique, s'investit pour permettre l'émergence de plateformes de données interopérables en France et en Europe, au service de la transition écologique. En effet, l'adaptation au changement climatique est un sujet transversal et complexe qui nécessite d'exploiter une quantité importante de données issues de sources variées, et donc de mettre en place une infrastructure technique permettant de collecter et d'exploiter ces données. Seule l'interopérabilité et la modélisation des données permettra aux territoires et de façon générale, aux acteurs publics et privés, d'exploiter au mieux les données pour répondre au défi climatique. Le Cerema mène de multiples actions, complémentaires, pour favoriser l'émergence de plateformes de données ouvertes et interopérables, au service de la transition écologique
Relais des politiques européennes sur le sujet du numérique et de la donnée
Le Cerema a un rôle de relais des politiques européennes sur le sujet du numérique et de la donnée, aux côtés de notre partenaire Cap Digital. Il a notamment organisé en mars 2025 un évènement au Hub des Territoires portant sur les Ressources et Dispositifs européens d’appui à la transition numérique des territoires.
Ces ressources et dispositifs comprennent notamment :
- Le soutien des villes dans leur transformation numérique (Lordimas, Smart Communities Network, Online Procurement Helpdesk)
- La mise en place d'une boîte à outils pour les jumeaux numériques locaux, pour exploiter le plein potentiel de l'IA et des jumeaux numériques locaux
- La mise en place d'un écosystème de solutions innovantes basées sur l'IA, réunissant des entreprises technologiques et des villes, grâce à l'EDIC - LTD CitiVerse, présenté ci-dessous et qui vise à exploiter cette boite à outils
Membre fondateur de l'EDIC LDT Citiverse
L’initiative «Networked Local Digital Twins towards the CitiVERSE» (LDT CitiVERSE EDIC) vise à connecter les jumeaux numériques locaux existants dans toute l’Europe, formant ainsi la base de l’initiative «EU CitiVERSE». Les jumeaux numériques locaux sont des représentations virtuelles des actifs physiques, des processus et des systèmes d'une ville. Les jumeaux numériques utilisent les données, les analyses et l'IA pour créer des modèles de simulation en temps réel qui reflètent les villes qu'ils représentent. Le CitiVERSE, légalement établi le 12 décembre à Valence, établit une nouvelle référence mondiale pour le développement coopératif des villes intelligentes. Il se concentre sur des solutions basées sur l'IA pour améliorer et mieux personnaliser la planification urbaine, y compris des simulations abordant (entre autres) l'impact de l'évolution des conditions de circulation sur la qualité de l'air, la décarbonation et la congestion. En outre, il explore les applications génératives de réalité virtuelle basées sur l'IA pour améliorer l'interaction des citoyens (par exemple, en simplifiant la consultation et la compréhension des changements urbains planifiés). L'EDIC LDT CitiVerse concerne actuellement 14 États membres de l’UE et connaît une expansion rapide.
Concrètement, l'EDIC LDT Citiverse vise à diffuser et pérenniser en France la "LDT EU Toolbox", un ensemble de composants open source financés par la commission européenne permettant de mettre en place des plateforme de données territoriales interopérables respectant les MIMs. Son objectif est de mutualiser les ressources, méthodes, standards et logiciels nécessaires à la conception, l’expérimentation et la mise en œuvre de Local Digital Twins (LDTs), c’est-à-dire des représentations numériques dynamiques et interopérables de territoires, appuyées sur des données en temps réel, des modèles analytiques et des visualisations 3D.
Rejoindre la Communauté de l'EDIC LDT Citiverse
Mise en place d'un groupe de travail national sur la souveraineté et l'interopérabilité des données
Pour accompagner la mise en place de l'EDIC LDT Citiverse, un groupe de travail sur la “souveraineté et interopérabilité des données” a été lancé, visant à assurer l’interopérabilité des déploiements qui vont être faits au fil des ans. En effet, en France, aucune orientation n’est donnée, ni aux industriels, ni aux collectivités. Or, il devient urgent de donner un cadre de référence en termes de déploiement de plateformes/gouvernance de données, qu’elles soient thématiques (espaces de données de type AgdatHub, Apidae) ou territoriales (Dijon, Nice, etc…). Le foisonnement nécessaire en période d’innovation a permis dans toute l’Europe l’émergence de multiples solutions techniques/configurations, dont il est souhaitable d’organiser la liaison et le passage à l’échelle pour de nouveaux déploiements. La qualification de ce que sont ces plateformes, dans leurs diverses fonctionnalités/mode de gouvernance, serait intéressante, tout comme la création d’un référentiel d’évaluation, ainsi que la mise en commun de modèles de données produits, des briques applicatives et API développées.
En effet, de multiples projets sont financés sur fonds publics et les productions réalisées dans ce cadre auraient intérêt à être mutualisées, pour assurer une réplicabilité. Pour cela, il est nécessaire de s’appuyer sur des tiers de confiance, pour outiller les territoires et “valider” la réplicabilité des solutions déjà déployées. C’est dans cette optique que les EDIC se créent et c’est dans cette posture de Tiers-de-confiance que le Cerema accompagne déjà des projets de territoires pour capitaliser sur ces projets (MAMP - Métropole Aix Marseille Provence -, SIEA,...).
En savoir plus le plan national
Membre du consortium visant à construire un jumeau numérique de la France et de ses Territoires
La démarche "Jumeau numérique de la France et de ses territoires" (JNFT) a été initiée mi-2022 par l'IGN, le Cerema et Inria, trois acteurs publics de référence en organisation des géodonnées, métiers liés au territoire, sciences et technologies du numérique. L'objectif est de déployer une démarche et l’outillage numérique nécessaire pour fédérer les initiatives locales et permettre le passage à l'échelle des jumeaux numériques de territoires, dans un cadre de co-construction public-privé et État-collectivités.
Pour cela, il s’agit de réunir une « équipe de France » d’offreurs de technologies, de producteurs de données géospatiales et d’utilisateurs de jumeaux numériques, en vue de déployer un ensemble de ressources techniques mutualisées, dont pourra ensuite être dérivée une grande variété de solutions cohérentes et à l’état de l’art. Conçu à partir de cas d’usage concrets, ce socle numérique ouvert et partagé, encouragera la structuration d’une filière économique vouée aux services à valeur ajoutée en matière de simulation et d’aide à la décision (gestion du risque, adaptation au changement climatique, assurance, transition écologique, transport…).
Un jumeau numérique de territoire (JNT) est une réplique numérique virtuelle et dynamique d’un territoire qui s’appuie sur des données géolocalisées, des outils de simulation et des services de visualisation et d’interaction. Plusieurs initiatives de JNT ont été engagées aujourd'hui en France, mais on constate que ces JNT sont en majorité l'apanage de quelques grands territoires urbains, qui en font un usage limité, souvent monothématique. Les outils existants sont rarement interopérables, ils sont utilisés en silo et les données sont sous-exploitées. Une mutualisation des initiatives, telle que préconisée notamment au niveau européen par l'EDIC local digital twins towards CITIverse, permettrait de passer à l'échelle en réduisant les coûts de R&D et de maintenance, en introduisant de l'interopérabilité et un partage de briques technologiques pour éviter les redondances, stimulerait l'innovation et favoriserait le partage de connaissances.
L'ambition portée par la démarche "Jumeau numérique de la France et des territoires" (JNFT) est d'être en capacité, au travers d'une nouvelle plateforme ouverte, coconstruite par un consortium d'acteurs publics et privés, d'adresser des sujets multithématiques dans une approche systémique grâce au croisement des données et des expertises, de favoriser l’accès au marché à des startups et à des PME innovantes en leur offrant une infrastructure socle pour développer des outils et services à forte valeur ajoutée, et de rapprocher le monde de la recherche du monde industriel pour accélérer l’identification et le dépassement de verrous technologiques et la mise sur le marché de solutions technologiques innovantes mobilisant ces jumeaux numériques de territoires.
Au sein de ce projet, le Cerema est chef de file pour la définition et la mise en oeuvre des cas d'usage, et intervient également pour assurer la cohérence du projet avec la stratégie européenne sur les données, notamment pour garantir l'interopérabilité du socle technique et son inscription dans le paysage des "Local Digital Twin" européens, en respectant les mécanismes minimum d'interopérabilité.
Rejoindre la communauté du JNFT (à venir)
Participation à la révision de la norme ISO 37101
L’ISO 37101, norme pivot relative à la ville durable publiée en 2016, fait l’objet d’un travail de relecture en profondeur. Trois projets originels (Chine, Japon, France), avaient été fusionnés par l’ISO dans une dynamique commune, répartissant les responsabilités au sein des sous-comités, comités techniques et groupes de travail.
A la suite de plusieurs constats (faible appropriation de la ressource par les territoires, en France comme en Europe et à l’international, accroissement des enjeux et des risques autour du développement durable, digitalisation accélérée des espaces urbains...), et dans le contexte d’une nécessaire articulation entre finalités du développement soutenable et émergence d’une démarche « smart »un projet d’actualisation est en cours.
En savoir plus la norme ISO 37101
Accompagnement de projets territoriaux en tant que tiers-de-confiance
Nouveaux services numériques, évolution des comportements et des attentes, importance de la maîtrise de la donnée stratégique pour les collectivités, évolution des réglementations... Les données et le numérique constituent des enjeux forts pour les collectivités. De nombreuses données sont produites à l'échelle des territoires, par les acteurs publics et privés, mais ces données restent trop souvent au sein des logiciels qui ont servi à les produire. Le partage - en respectant les droits de chacun - et l'interopérabilité sont alors des impératifs pour garantir la souveraineté des données à l'échelle d'un territoire.
Pour répondre à ces enjeux, le Cerema peut intervenir auprès des collectivités de différentes façons :
- pour aider à définir une stratégie globale de territoire intelligent et durable ;
- pour accompagner la mise en œuvre d'une gouvernance des données au service des politiques publiques ;
- pour accompagner l’évaluation de projets qui intègrent des technologies numériques et qui sont déjà mis en œuvre ;
- pour intervenir en tant qu'expert sur un dispositif numérique lié à l'un de ses domaines de travail (inondations, déchets, éclairage, foncier...) ;
- et bien d'autres.
Une particularité du Cerema : son positionnement en tiers de confiance. Il peut ainsi aider à constituer des collectifs - locaux ou nationaux - avec des collectivités et des acteurs socioéconomiques, sans avoir de parti pris. Autre spécificité : grâce à sa dimension nationale, le Cerema lance des programmes impliquant simultanément plusieurs territoires afin de créer des communautés de partage d’expériences et une montée en compétences collective.
Le Cerema propose une offre de services aux territoires qui synthétise l'ensemble des interventions possibles pour accompagner vos projets.